Une petite femme allongée
- Olivier
- 15 nov.
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 déc.

Le sommeil est un motif récurrent dans la sculpture balinaise moderne. Il est le thème central des figures étendues sur fond plan dont voici un exemple. Ces figures vont souvent par paire: un dormeur, une dormeuse, celle-ci étant parfois accompagnée d’un enfant. Elles semblent avoir été populaires entre les années 1930 et 1960. On en trouve dans le style wayang aussi bien que dans un style relativement réaliste, comme celle-ci.
Ces pièces sont généralement sculptées en haut-relief, c’est-à-dire qu’elles ont l’apparence d’une figure complète reposant sur un fond plan. Il est amusant de remarquer que l’utilisation de cette technique dans la représentation de ce type de motif répond à une logique simple et efficace. Dans la plupart des reliefs balinais, la surface sur laquelle se détachent les figures obéit à une convention: elle remplace la profondeur réelle du décor par un jeu d'éléments décoratifs dressés sur un plan vertical, ou donne l'illusion d'une profondeur grâce à des procédés empruntés à la peinture, comme la superposition de motifs (architecture, végétation...), traités en faible épaisseur. Ici, au contraire, le fond se donne simplement comme l’équivalent en réduction de la natte sur laquelle le personnage est étendu. Il semble donc naturel d’exposer ces pièces à plat, sur une surface horizontale. Certains cependant préfèrent les fixer au mur, ce qui peut donner l’impression que ces figures sont étrangement suspendues dans leur sommeil.
Cette petite dormeuse (à peine 25 cm de long) date probablement des années 1940 ou 1950. Elle a été taillée dans un beau bois ocre brun. Le traitement de l'attitude témoigne d’un sens aigu de l’observation. Le placement des bras, des cuisses et de la partie inférieure des jambes suit un jeu contrasté d’obliques. Une main disparaît dans la longue chevelure et soutient doucement la tête inclinée vers la gauche, tandis que l’autre est posée sur le ventre, le pouce glissé sous un repli de la couverture. Un léger basculement du bassin oriente le bas du corps dans la direction opposée à celle du visage, la jambe droite demeurant plus relevée que la gauche, comme si la dormeuse était en train de se tourner sur sa couche. L’ensemble produit une impression de sérénité et d’élégante nonchalance.

Si ce type de figure est relativement courant, il est rare d’en trouver une qui soit aussi finement exécutée que celle-ci. Au-delà de l’habileté dans le rendu de l’attitude, la précision et l’harmonie des traits du visage, la qualité du traitement de la chevelure, des mains et des pieds en font une pièce remarquable. Le sculpteur a opté pour un style tendant vers le réalisme, tout en conservant des traits qui laissent supposer une familiarité avec le style wayang: l’allongement des doigts, l’utilisation d’une double incision pour marquer la naissance des ongles, ou encore le contraste entre les lignes brisées de la frange du tissu et les formes du corps. Autant d’éléments qui me semblent justifier l'hypothèse d'une date assez précoce pour la création de cette pièce.



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